katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

jeudi, janvier 01, 2015

Je vous raconte des histoires. Croyez-moi.



Lisant "The Passion", de Jeanette Winterson, un refrain qui s'y trouve ("I am telling you stories. Trust me."), me fait penser, en vrac, à Gary, forcément, à "Big Fish", à "Darjeeling Express" ("All my charachters are fictional" récité comme un lamento par celui qui écrit, à qui ses frangins disent régulièrement combien ils ont apprécié la manière dont il a dépeint tel ou tel autre personnage de leur famille), à Noël qui vient de s'en aller, la hotte vide, la panse trop pleine,...

Je déguste aussi, pour digérer, quelques "menus propos" de Pierre Girard, encore un fabuleux écrivain trop peu connu, qui me renvoie, dans ma constellation personnelle, à Pierre-Laurent Ellenberger et à Pierre Foglia.

J'ai traduit un joli petit texte d'une pochette d'Eric Clapton, pour Vale d'Amour, qui veut l'offrir à son père. Il y dit ceci, en hommage à Robert Johnson, autour de qui l'album est construit:

"C'est une chose remarquable d'avoir été conduit et influencé toute ma vie par le travail d'un homme. Et même si j'accepte que cela a toujours été la clef de voûte de ma base musicale, je ne le regarderais toujours pas comme une obsession, mais plutôt je préfère y penser comme à un repère qui m'a guidé quand je naviguais, même quand je partais à la dérive."

Envie, pour ce premier jour de l'année, de vous traduire également un fragment d'une chronique de Manuel António Pina, que je sirote avec joie:

"Avec le printemps et le bourgeonnement des feuille fleurit glorieusement dans la ville l'espèce confuse des conducteurs du dimanche.
[...]
Ils s'exaspèrent ceux qui affrontent (jugent-ils) le destin et sont pressés d'y arriver. Mais il n'y a pas de colère dans le monde capable de perturber l'inutilité des dimanches de Porto. Moi, sa lenteur me rend éternel. Sa patience impassible, si elle prenait place un jour de semaine, serait dangereusement subversive, son indifférence complètement immorale. Qu'ils réussissent, pour le moins les dimanches, à étaler ainsi absolument leur, et notre, droit à l'improductivité, voilà ce qui constitue peut-être le miracle capable d'amener un cynique à se réconcilier avec le genre humain, dans la singulière version du genre humain que sont les conducteurs de Porto.
[...].
Nous restons ici simplement en restant ici, avec les yeux regardant, en silence, ou parlant pour parler, parce que ce n'est pas un jour pour se dire quoique ce soit, peut-être fumant, pendant que les enfants, sur la banquette arrière, pour profiter du temps (complètement irrécupérables, les enfants, incapables qu'ils sont de ne faire absolument rien), dorment. Et, après, à six ou sept heures, quand l'après-midi lentement s'éteindra, nous rentreront de nouveau à la maison, à lundi et aux chroniques avec sujet."

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Moi, ces derniers jours, j'ai très, très, mais alors très très très envie d'aller passer quelques jours, à Porto... Merci pour ce texte.

Benoit

09 janvier, 2015 19:30  

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