« Si l’on se demande comment l’humanité a pu penser à se transformer ainsi, il faut répondre qu’elle a agi comme tous les enfants raisonnables quand ils ont essayé trop tôt de marcher ; elle s’est assise par terre, elle a touché la terre avec une partie du corps peu noble sans doute, mais sur laquelle on peut se reposer. L’étrange est que la terre se soit montrée si sensible à ce procédé et qu’elle se soit laissée arracher, depuis cette prise de contact, une telle foison de découvertes, de commodités et de connaissances qu’on en crierait presque au miracle »
Je viens de passer un séjour merveilleux, un peu à l’extérieur du monde, beaucoup hors du temps.
Samedi matin, alors que je reprenais le fil de l’information quelque peu délaissé, je constatais que, de la Turquie aux Etats-Unis, il avait s’agit d’une nouvelle bien sanglante semaine.
Quelques lectures (« Les religions meurtrières » d’Elie Barnavi, « L’Homme sans qualités » de Musil (dont sont extraits les passages ci-dessus et ci-dessous)) et de fortes intéressantes discussions avec Thomas m’ont fourni de nouveaux « outils » pour affronter ces irréalités quotidiennes que l’être humain dissémine un peu partout avec délectation.
Les problèmes posés par l’institutionnalisation à outrance, les limites de la recherche perpétuelle de sécurité et de certitudes, la difficile compatibilité du terme de laïcité appliqué à d’autres religions que la chrétienne (seule à avoir tout de suite dû, par le fait de circonstances historiques spécifiques, distinguer pouvoir temporel et spirituel), tout cela prenait, en puissance, trop de non-sens et d’indécence.
Les dérives de l’intelligence sacrificielle ne plaidaient pas en faveur des droits de l’Homme.
Puis, un peu plus tard, après avoir assisté impuissant au viol dans les règles de lard d’une madame colvert par quatre de ses semblables, c’est l’entier du règne animal qui semblait méchamment battre de l’aile.
Aujourd’hui, journée mondiale du livre, je fais le souhait de me réincarner en arbre, peut-être aurais-je ainsi la possibilité de devenir, après coups de haches, quelques unes de ces pages qui dessillent les yeux.
« Cela n’existe plus, avança Ulrich. Tu n’as qu’à jeter un coup d’œil dans le journal. Il est rempli d’une opacité démesurée. Il y est question de tant de choses que cela dépasse de loin la capacité de pensée d’un Leibniz. Mais on ne s’en aperçoit même pas ; on a changé. Il n’y a plus maintenant un homme total face à un monde total, mais un quelque chose d’humain flottant dans un bouillon de culture général. »
Ceci a été écrit il y a bientôt cent ans…
Libellés : Pensées vagabondes
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home