katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

dimanche, octobre 19, 2008

L'adorable absinthe de l'âme


















« On va au blanc. A la montagne qui porte ce nom et à toutes celles qui ont du blanc ! Et on va à la révélation qu’il y a là-dessous. »

C’est dans « La haute route » de Maurice Chappaz que je suis allé chercher ces lignes. Un livre que comme tant d’autres, hier en milieu d’après-midi, je pensais ne jamais plus pouvoir lire.

Les quatre premières heures de marche avaient défilé à vive allure, le pas était sûr, les marcheurs plutôt en forme. Il avait été question de l’expérience du chat de Schrödinger, de portes dans un train circulant à la vitesse de la lumière, des écrivains ouest africains,...

Tant qu’il y avait du vert et du jaune, c’est comme si le vide n’était pas là.

Je me laissais aller à quelques hurlements qui faisaient frétiller les oreilles de Paulo la Science. Elle était là la vie, je la sentais, je me sentais vibrer jusqu’au bout des orteils.

Puis. Puis.



Puis nous avons compris où était la cabane où nous nous proposions d’aller. Elle caressait le menton des Dents du Midi. Nous nous sommes lancés, Raoul avec une facilité déconcertante, Paul plutôt à l’aise ; enfin jusqu’à ce que je lui fasse part de mes doutes quant au caractère judicieux de notre entreprise. Ma couleur devant osciller entre le violet et le bleu pâle, il a aussi commencé à réaliser où nous étions. Et à prendre en pleine face, comme moi, ces mots de Chappaz :

« Lever les yeux déséquilibre. »

Les baisser aussi, ce qui n'allégeait pas considérablement le problème.


On a continué un bout, on ne voyait plus le troisième larron, chamois qu’il était depuis une trentaine de minutes. Arrivant à une pierre qui permettait de s'asseoir, j’ai dit à Paul qu’un thé allait s’avérer indispensable pour que je rassemble mes esprits. J’étais vraiment, vraiment, vraiment mal (Paul a des photos de ce grand moment, peut-être que je vous les montrerai un jour).

Je lui ai dit que j’allais faire mon impossible pour arriver en haut, mais que je ne pouvais pas envisager de redescendre le lendemain, ce serait vraiment au-dessus de mes forces.

Nous sommes repartis, je n’avais plus de jambes, juste un short (oui j’étais en short, quand on est malin, on est malin jusqu’au bout), mon cœur aurait remporté haut la main tous les concours de Djembe auxquels il aurait pu se présenter. Mes yeux fixaient un cercle fictif d’un petit mètre de diamètre, pour arrêter de penser le plus possible au cadre où nous évoluions.

Raoul, ayant déposé son sac, est venu aux nouvelles, ma tête a épargné pas mal d’explications.

Puis nous sommes finalement arrivés. De la Beauté pure partout. Je reprenais petit à petit mes esprits tout en maintenant que je serais incapable de faire le chemin de la mort en sens inverse.

Nous avons mangé des pâtes et bu du thé en faisant fondre de la neige, j’étais un peu ailleurs, encore retourné par la dernière heure d’ascension.

Nous avons regagné nous couettes avant 21h, n’avons pas tardé à trouver le sommeil.

Ce matin, je me suis levé le premier, je suis sorti contempler ce flacon d’essence de merveilleux qui se déversait de tous côtés. J’ai avancé jusqu’à une extrémité. Un chamois se promenait. Il m’a regardé, m’a dit que je l’avais bien fait rire, hier. Il a ajouté que j’allais réussir, aujourd'hui, que je devais essayer, me prouver que j'en étais capable; que c’était le meilleur vaccin possible contre mon vertige. Soigner le mal par le mal.

C’est lui qui m’a mis Chappaz en tête. Il m’a dit que j’avais oublié une des formules magiques qu’il utilisait dans ses dernières pages : « L’adorable absinthe de l’âme ». C’est avec cela que je devais me griser avant de partir, qu’ensuite je n’avais qu’à chanter ; alors tout se passerait bien.

J’ai suivi ses conseils, Paul et Raoul ont été impeccables, comme toujours.

Maintenant je peux vous écrire, attendant Raphaël avec impatience pour que nous vidions la bouteille de Petite Arvine qui siffle dans le réfrigérateur.

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5 Comments:

Anonymous Anonyme said...

yououou, vive la montagne... et les lumières d'automne...

20 octobre, 2008 13:03  
Anonymous Anonyme said...

Merci pour le voyage.
Mais comme j'ai le vertige aussi, tu m'a presque fait revivre mon malaise des Pyrénées l'an dernier...
Les photos sont parlantes (et splendides), mais on attend les photos de Paul :o)
Bisous,

B.

20 octobre, 2008 22:38  
Anonymous Anonyme said...

t'arrives encore à marcher toi?!...

21 octobre, 2008 07:56  
Anonymous Anonyme said...

Et voilà les curieux... je crois que son visage en dit long... ;-) j't'aime mon Katchon...

http://www.flickr.com/photos/31601356@N03/sets/72157608226853554/

21 octobre, 2008 11:36  
Anonymous Anonyme said...

et pourtant c'est pas faute de t'avoir prevenu au nord vaudois vous n'avez pas de "montagne" juste quelques collines ,un jura bien joli quand il est habillé de ses couleurs automnales mais rien de comparable face a mes Dents- du- midi!!!J'éspère quand même que tu profité de la vue et que tu as repéré mon si joli village chablaisan! "sans rancune" !!"bisous taratata.

22 octobre, 2008 21:33  

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