katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

dimanche, novembre 11, 2007

Le calame après la trempette

Alors que mon dernier message envoyé à Benoît était pour le moins apocalyptique, vagabonder dans Salzbourg à 7h un dimanche matin prolonge l’atmosphère de fin du monde qui hiberne à moitié dans les limbes de mon cerveau défraîchi.

Voici l’amorce d’un texte lancé cette semaine contre le mur de papier qui encadre les fioritures de mes pensées :

J’ai beau la tourner dans tous les sens, chambouler les conventions orthographiques pour la mettre sang dessus dessous, essayer de la vider en m’avachissant devant les écrans qui pleuvent de partout, rien y fait, tout la défait : ma tête est une arène.

Je longe la Salzach alors que le jour n’est pas encore levé, je m’imagine futur pianiste de génie étudiant au Mozarteum, me reviennent alors avec violence ces mots de Thomas Bernhard dans « Le naufragé » :

« Nous sommes si orgueilleux que nous croyons qu'il importe d'étudier la musique alors que nous ne sommes même pas capables de vivre, même pas en mesure d'exister, car le fait est que nous n'existons pas, le fait est que ça nous existe ! »

Je me glisse à nouveau dans la ville, seuls le froid et le vent peuplent les rues, les murs m’arrogancent de leur glaciale hauteur.

Je décide d’affronter l’apparente hostilité de la colline qui me fait face, je traverse la rivière, monte les escaliers, franchis de ténébreuses portes, puis, lorsque je m’arrête un instant, j’entends derrière moi deux grognements distincts qui se rapprochent à vive allure.

Effectivement, deux chiens qui ne semblent pas vouloir juste me serrer la patte m’ont apparemment en ligne de mire. Plus que vingt mètre, dix, cinq.

Je titillais dans mon précédant message l’acoolaïcité ambiante, sans pour autant me revêtir de l’ombre d’une appartenance religieuse, alors là, à qui dois-je m’en remettre ?

C’est une voix autoritaire qui me permet de ne pas finir en lambeaux, une dame qui fait son pas de course et qui, écoutant de la musique en se souciant peu de la survie de ses tympans, n’a pas entendu que ses deux compagnons de jeu étaient sur le point de faire de moi une bien velue croquette pour cerbères peu coopérants.

Elle me dépasse en me portant autant de considération qu’à la poubelle qui, hilare, me fait du coude. Deux pigeons et une famille d’écureuils en ont également eu pour leur argent, ils se gaussent tellement qu’ils n’arrivent pas à réclamer un ultime rappel.

Bon joueur, je les salue en me délestant d’un chapeau fictif, prolongeant cet instant onirique.

Hier, dans le train, j’ai commencé à déchiffrer, avec l’aide de mon précieux dictionnaire de poche, « Die Stille ist ein Geraüsch » ( Le silence (le calme ?) est un bruit) de Juli Zeh, j’y ai souligné ceci :

« Wer die Hölle überleben will, muss ihre Temperatur annehmen »

« Qui veut survivre à l’Enfer doit accepter sa température. »

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6 Comments:

Anonymous Anonyme said...

"Nous sommes si orgueilleux que nous croyons qu'il importe d'étudier la musique alors que nous ne sommes même pas capables de vivre, même pas en mesure d'exister, car le fait est que nous n'existons pas, le fait est que ça nous existe !"

Étudier la musique, C'EST VIVRE!!!!
Nous existons À TRAVERS la musique.
Il est tellement pas content le Thomas que c'est lui qui est tout à l'orgueil de sa petite blessure personelle. Il en a fait une oeuvre complète: " "Nous sommes si orgueilleux que nous croyons qu'il importe d'écrire alors que nous ne sommes même pas capables de vivre, même pas en mesure d'exister, car le fait est que nous n'existons pas, le fait est que ça nous existe !"

Ben oui, Thomas existe encore à travers ses livres. La détestation de cet "orgueil" j'y crois pas une miette.

Julie Zeh m'intrique par contre.

11 novembre, 2007 20:09  
Anonymous Anonyme said...

Ouep et il fait sacrément chaud punaise...quelle fournaise!

Pfiou....yououououou j'adore Parole de femme d'Annie Leclerc merci donc aux 2 passeurs ;-) ...

Ah là là...tant à dire...

et peut-être d'abord que s'il était question de parler vraiment de la mort...
eh ben je crois que malgré les écrits féminins qui se sont étoffés, il reste encore du job pour que un discours vrai sur l'identité féminine arrive dans les chaumières (celles avec la cheminée et la bouteille avec Paris dedans)...

Et pour en parler vraiment, là aussi je crois qu'on ne peut faire l'économique du vécu et du ressenti personelle.... alors pour celles et ceux qui aimerait en parler à leur fille et qui ne trouvent pas les mots....
...Annie Leclec...c'est mieux qu'un bonbon à l'anis...et ça vous donnera peut-être quelques pistes....

J'ai pas encore terminé mais jusqu'au milieu du livre..que du bonheur ;-)...

Je saute à pied joints sur les parties où elle parle de la manière dont elle a apprivoisé et accepté son corps de femme...parce que je ne vais pas postuler ce soir, il se fait tard...mais vraiment allez-y voir...

Apprivoiser l'identité féminine en acceptant la température de l'Enfer?... ou plutôt une température plutôt agréable ... "...je sens mon corps comme une maison, douce du soleil entré, tiède de pluie,...."...

J'en dis pas plus sur le corps, pas envie de "m'intimiser" et Annie Leclerc le fait si bien qu'on a envie qu'elle soit notre grand-mère et nous raconte son histoire comme seule une dame de cet âge sait le faire...

(ce qui n'est pas correct mais qui évite de prendre la responsabilité d'un tel discours quand on a pas l'âge de raison...sinon gare à la police...et aux qu'en dira-t-on)

... et alors, suspendues au lèvres de grand-maman, chaque mot ferrait écho à de secrètes questions de femme chaque jour en devenir...

Je vous rapporte juste des échos à des questions politiquement relativement correctes (on a pas garder les cochons ensemble non plus ;-)...et moi ça m'fait sourire...ces deux formules baricades...pfff...)

"pourrons-nous jamais apprendre à nous aimer, à nous reconnaître nous-mêmes, un et divers, mais pas deux, surtout pas deux, comme à la guerre, comme sur le ring..."

"Il faut dire maintenant tout ce que j'ai à dire...J'ai si peur que je suis toujours tentée de différer, de remettr à plus tard, de rêver seulement ce que je sais"

"Je connais, j'affirme, je veux la différence de mon sexe. C'est différent que je t'appelle, c'est différente que tu me cherches. C'est à un autre que nous tendons, et c'est par l'autre que nous jouissons. Toi de moi et moi de toi. Toi d'une femme et moi d'un homme. Toi d'habiter et moi d'être habitée.
Mais non je ne crache pas sur les jouissances homosexuelles. Je refuse simplement d'y voir l'expression d'une indifférenciation sexuelle. Je peux jouir de mon autre semblable, et tu peux jouir de ton autre semblable. Je ne saurais jouir d'une femme comme tu en jouis toi, parce que je suis femme, et tu ne saurais jouir d'un homme comme j'en jouis moi, parce que tu es un homme. Et ce que j'aime dans la femme c'est tout ce qui la fait différente de toi. A vrai dire je n'aime que dans la perspective de la différence."

11 novembre, 2007 23:23  
Anonymous Anonyme said...

J'adore t'imaginer comme une petite Blanche-Neige en empatie avec les pigeons et les ecureuilles après que les chiens méchants sont retournés à la mechante belle-mère!

tu sauras ne pas te perdre ni dans le vide ni dans le trops plein d'idées.

bisous

"celle qui met toujours une faute de français dans ses messeges"

12 novembre, 2007 16:51  
Anonymous Anonyme said...

accepter ou adopter sa température?

12 novembre, 2007 19:50  
Anonymous Anonyme said...

ah la température....l'adopter, l'accepter, l'admettre, l'approuver, l'aggréer...la gréer...wouai, la gréer, ça me plaît c't'idée, la gréer et après faire le tour du monde (ou du lac c'est plus raisonnable)...et puis plonger de temps en temps dans un livre et en ressortir tout mouillé...c'est l'hiver mais j't'assure elle est extra, tu viens aussi?...

12 novembre, 2007 20:49  
Blogger katch said...

Juste un merci en vitesse, avec bisous et sourires, à Benoît, Denise et anonymette qui donnent souvent de l'ampleur aux messages...

13 novembre, 2007 09:10  

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