katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

samedi, octobre 13, 2007

Une journée qui s'étire

« Greogorius tourna les talons et marcha lentement vers le pont de Kirchenfeld. Quand le pont fut en vue, il eut le sentiment étrange, aussi inquiétant que libérateur, qu’à l’âge de 57 ans il allait pour la première fois prendre sa vie en main. »

A la fin de chaque chapitre, je lève la tête pour contempler les miroitements qui patinent sur la Sarine et pour m’imprégner pleinement du début de cette histoire qui, immédiatement, me ravit.

Gregorius n’est pas encore parti pour Lisbonne, mais la tension est déjà bien présente, les pages défilent.

« Le véritable metteur en scène de nos vies est le hasard – un metteur en scène plein de cruauté, de miséricorde et de charme captivant. »

Il y a un livre, celui, merveilleux, que je viens de commencer, et il y a un livre dans le livre, fruit d’une découverte de Gregorius qui, ajouté à la rencontre d’une troublante portugaise, pousse ce brave type à prendre le train pour un long périple vers l’inconnu.

De cet ouvrage, Gregorius ne connaît rien, mais, lorsque le bouquiniste chez qui il le trouve lui en traduit l’introduction, il a le sentiment qu’il a été écrit pour lui, alors il l’achète et il décide qu’il tient à présent, dans ses mains, dans une langue inconnue, un objet indispensable pour « prendre enfin sa vie en main ».

Ceci semble mettre en perspective une anecdote que Denise (celle qui a postulé dans le livre des records du monde pour les commentaires de blog les plus longs) me tiendra, même heure et même endroit (inimitable terrasse du café du Belvédère), le lendemain de ma lecture. Denise a tout d’abord étudié la biologie à l’université, avant de suivre des cours à la Haute Ecole Pédagogique pour enseigner, profession qui n’a pas d’avantage rempli ses attentes et qui l’a amenée, une nouvelle fois, à changer d’orientation.

Verdict sans appel d’une personne à qui elle expliquait ce cheminement : « Alors tu es instable ?!? ».

Je ne sais jamais si je dois rire ou pleurer lorsque la stabilité, la responsabilité, la réussite et tous ces mots beaucoup trop clinquants à mon goût sont accolés à l’acceptation d’une vie où plus rien ne se passe que le même film muet dans lequel, lorsque les images s’épuisent, on s’invente des moyens de remettre le son. Un enfant par exemple.

« Gregorius ne devait jamais oublier cette scène. C’étaient ces premiers mots portugais dans le monde réel, et ils agissaient. Que des mots puissent provoquer quelque chose, mettre quelqu’un en mouvement ou l’arrêter, le faire rire ou le faire pleurer : enfant, déjà, il avait trouvé cela énigmatique et il n’avait jamais cessé d’en être impressionné. Comment les mots parvenaient à ce résultat ? N’était-ce pas comme de la magie ? En ce moment, le mystère semblait plus grand que jamais, car c’étaient des mots dont il n’avait encore aucune idée hier matin. »

Samedi matin, je suis assis au Café de la Marionnette, endroit miraculeux bercé par Beth Gibbons. Sur le tableau noir qui me fait face est noté cette pensée exquise de Sidney Smith : « La soupe explique la moitié des émotions de la vie ».

Je n’ai pas pianoté sur mon clavier depuis mardi matin à l’aube, j’avais alors commencé à rassembler les ondes qui avaient parcouru ma tête le jour précédent.

Lundi, en fin d’après-midi, mon regard se perdait dans l’entame de la Vallée du Gottéron, je voulais garder en mémoire les éléments troublants des heures fraîchement écoulées, alors j’avais déposé, par l’intermédiaire d’un léger frottement de l’extrémité de mon pouce et de mon majeur, une pincée de mots sur le carnet qui m’accompagnait.

Je crois que mon blog, ce minuscule balcon donnant sur une des chambres de l’appartement infini abritant ma tête et ses égarements, va désormais ressembler à cela, une coquille d’escargot qui roule, parfois s’arrête (lorsqu’un semblant de cohérence peut-être attribué à mes étourdissements) mais souvent se contente de petits sauts (lorsqu’il ne s’agit que de l’envie de donner à voir un élément troublant, intriguant, dont je ne sais pas vraiment quoi faire ni quoi penser mais qui s’impose à moi).

Un petit atelier où coller mes esquisses, où portraiturer, où raturer, un endroit que j’espère toujours chaleureux au sein duquel vos contributions sont bienvenues, des petits « gâteaux maisons » pour accompagner le thé et le café que je me fais un devoir de tenir toujours à disposition.

« Maintenant enfin il me semble que je se sais ce qui me force à reprendre sans cesse le chemin de l’école : je voudrais revenir à ces minutes dans la cour, pendant lesquelles le passé était tombé de nous sans que le futur eût déjà commencé. Le temps s’arrêtait et retenait son souffle comme il ne la plus jamais fait par la suite. »

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2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Me réjouis de suivre l'évolution de l'escargot.

Tant de livre à lire tant de mots à dire...
Tout d'bon aussi à Gregorius ;-), il fait bien de tenter l’coup, un paquet magique de courage pour la suite…
Et pour ne pas te donner raison, je continuerai par mail pfff ;-)

Tu vois j'ai bien intégré les règles, je sais me retenir publiquement s'il faut...pfff

13 octobre, 2007 18:49  
Anonymous Anonyme said...

Bonjour,

Je suis "tombée" par hasard sur ton blog. J'y ai lu tes derniers écrits.
Certains m'ont plu.

Une petite suggestion sans prétention:
Offre-toi le luxe d'un peu plus de simplicité. Découpe mieux tes phrases, quitte à disséquer tes pensées. Tu y gagneras en lisibilité.

Bonne continuation!

15 octobre, 2007 17:12  

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