katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

mercredi, octobre 10, 2007

De la Suisse dans les idées

Un banc et un rayon de soleil bavardent. Intrigué, je m’assieds sur une chaise toute proche, tends l’oreille, il est question des infidélités d’un moineau, intimité qui m’émeut mais ne me regarde pas, alors je remets mes écouteurs et déplie le journal.

Editorial du « Temps » du lundi 8 octobre 2007, par D. S. Miéville:

« […] Le monde s’intéresse pour une fois au Sonderfall suisse en période électorale et s’étonne de ce qu’il découvre, bien loin de l’image idyllique d’un pays faisant cohabiter dans l’harmonie plusieurs langues et culture ayant perfectionné à l’extrême l’exercice de la démocratie. De quoi avons-nous l’air en effet ? […]. Si l’on laisse le son en coupant l’image, c’est à peu près le tableau clinique d’une république d’Asie centrale qui se dégage. L’image vaut-elle mieux quand l’émeute est dans la rue et devant le Palais du parlement, la police absente et ridicule, la sécurité incapable de parer l’arrivée d’émeutiers annoncés depuis des semaines et les braves gens, comme toujours et comme partout, pris en otage ? »

Bon des braves gens, je ne sais pas trop ce que c’est, et je ne suis pas certain que ce soit les mêmes en Asie centrale ou à Unterwald, mais qu’à cela ne tienne, il y a des remous dans notre mollassonne Helvétie. A Berne, samedi dernier, il y a eu de la castagne.

D’un côté, le parti suisse né des couches culottes de Guillaume Tell, de l’autre, des amis des bisounours venus spécialement des nuages pour exprimer leur mécontentement aux premiers nommés.

Venus pimenter et donner dimension humaine à ce tableau où la fiction dépasse la réalité, des individus armés de pierres et de toute la puissance de leurs cerveaux d’acariens.

Donc dérapages.

Et la Suisse se réveille avec la gueule de bois, ce qui est somme toute assez logique au vu de la consommation quotidienne des gens qui la composent.

Cette journée surréaliste dans notre belle capitale me fait penser que Gary, qui y a vécu 18 mois d’ennui à l’Ambassade de France en 1953, en donne dans « La nuit sera calme » une définition qui s’applique assez bien à cette étrange journée :

« L’effet que Berne peut faire aux gens, c’est tout à fait bizarre. C’est certainement le lieu le plus mystérieux au monde, une espèce d’atlantide qu’il reste à découvrir. Tu sais, un de ces endroits où tout se passe toujours ailleurs. »

J’épluche distraitement le reste du journal, ces divagations sur Berne et les paroles de Lobo Antunes m’ont donné envie de commencer un roman que j’ai acheté à Paris : « Train de nuit pour Lisbonne » de Pascal Mercier, je sais juste qu’il s’agit d’un professeur bernois qui décide de tout laisser tomber pour s’en aller à Lisbonne.

J’endosse mon sac pour rentrer chez moi, c’est maintenant Collette Fellous et ses Carnets nomades qui vont rythmer mes pas.

Arezki Mellal, un auteur algérien, met en avant quelque chose qui me plaît beaucoup. Selon lui, ce qui signe la défaite de l’islamisme dans son pays, c’est la puissance de la résistance individuelle, de la répétition de gestes quotidiens en désaccord avec les doctrines en vigueur. Ce n’est pas la mise sur pied d’une organisation, d’un front de refus solidaire, mais simplement le fait que chacun, devant sa porte, au tournant de sa rue, refuse à sa manière une partie de l’oppression. Une mèche de cheveux qui dépasse, un sourire (je vous « colle » le lien sur un article de Rima Elkouri (non, ce n’est pas mon nom en verlan !), elle y parle du voile, mettant en évidence toutes les nuances que l’on manque souvent de soulever lorsqu’il s’agit de ce sujet brûlant : http://www.cyberpresse.ca/article/20070924/CPOPINIONS05/709240478/6751/CPOPINIONS05).

Je pourrais aller dire ça à ce merveilleux Couchepin la prochaine fois qu’il se plaindra qu’un des problèmes actuels, en Suisse, c’est que la bonne volonté peine souvent à s’organiser en institutions, que cela reste des élans qui peuvent s’essouffler très vite.

Bien sûr, mais c’est ce souffle individuel qui fait la différence, ce souffle atomique qui façonne la valeur, loin des souffleries perfectionnées de cheminées sans âme.

Les institutions pérennisent, très bien, passons-nous donc du Père et des pères sentencieux.

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1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Je retrouve avec plaisir les mots offerts mardi ;-)...d'Arezki Mellal...
pour moi cela raisonne avec le mouvement de simplicité volontaire... (enfin pr une part)

mais là j'ai envie d'écrire un pavé...
celui sous lequel il y a la plage...
mais j'ai faim...
alors j'hésite
il y a le pavé de la boucherie et celui de la chocolaterie...

Vive les mots ;-)

11 octobre, 2007 12:16  

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