symphonie solennelle
Elle est là, juste à côté de la route, sur une place théoriquement prévue pour que s’y gare une voiture, elle agite les bras, regard au loin. Sûre de son fait, ayant l’impression d’orchestrer le flot de circulation qui se déverse en fin de journée, elle fait des mouvements amples et répétitifs, parfois quelques petits pas en arrière, puis en avant, puis à nouveau en arrière.
Tu comprends le mot « solennel » ? Comment est-ce que l’on dit, en allemand ?
Nous venions de passer un moment au Pois Café, un sympathique endroit tenu par des Autrichiens, quelques fauteuils invitent à s’y prélasser longuement. Il y avait Leonard Cohen et Joan Baez, en musique de fond, deux soupes parfumaient notre discussion. Un moment, sans que je sache vraiment pourquoi, je me suis laissé aller à mes prévisions plutôt apocalyptiques.
Jetant un œil sur l’heure, nous avions alors constaté qu’il était temps de nous mettre en route si nous espérions arriver dans les temps pour « Au hasard Balthazar », film projeté dans le cadre d’un cycle Robert Bresson, à la cinémathèque. Comme l’âne du film imprègne chacune des pages de « L’âne de Schubert », d’Andy Merrifield, une de mes lectures de fin d’année dernière qui m’a le plus posé la main sur l’épaule, j’avais envie d’assouvir ma curiosité.
Nous nous sommes donc mis en route, d’un pas alerte, presque alerté, pour elle, puisque ses jambes doivent faire la moitié des miennes, environ.
C’est là que je lui ai dit que je me trouvais bien solennel, lorsque je parlais de cette pesante manière. Elle a souri. Feierlich, on dit, en allemand.
Solene, en portugais.
Nous sommes arrivés juste à l’heure, avons pris deux billets, nous sommes installés tout devant, seule rangée où il restait de la place. Le générique a commencé.
« Freud », de John Huston.
J’avais, pour changer un peu, été un champion du monde.
J’ai tenu une trentaine de minutes, puis bien conscient d’exaspérer mes voisins par mes rires et mes mouvements de tête intempestifs, j’ai proposé à Meike de nous en aller.
Elle a souri. Der Dachs, on dit, le blaireau ; ou der Einfaltspinsel.
Texugo, en portugais.
Nous sommes allés boire une infusion de tilleul à
Solemn, en anglais.
T’avais pas commencé tout cela avec une miss un peu folle au bord de la route ?!?
Si, si, vous suivez remarquablement le fil, c’est sympa de vous perdre avec moi.
Elle est là, juste à côté de la route, sur une place théoriquement prévue pour que s’y gare une voiture, elle agite les bras, regard au loin. Sûre de son fait, ayant l’impression d’orchestrer le flot de circulation qui se déverse en fin de journée, elle fait des mouvements amples et répétitifs, parfois quelques petits pas en arrière, puis en avant, puis à nouveau en arrière.
En rire, en pleurer, s’en indifférer ?
A quoi cela ressemble la bouilloire, voire la bouillie, qui ronfle dans le crâne d’un idéaliste qui se moque des idéalistes ?
Comment essayer d’être un peu lucide sans que cela rime en permanence avec mal au bide ?!?
Plusieurs cerfs-volants s’en chargent, me concernant, me donnant l’impression de survoler la décharge ; ma plume s’acharne à traquer le décharné pour, tant bien que mal, l’incarner.
Brocardant ceux qui ricanent pour mieux aborder ceux qui crament, d’indifférence, de trop de défiance, de trop de méfiance ; de trop de familiales et sociales exigences.
« Je n’ai pas compris et j’en fus impressionné. Je suis toujours impressionné par l’incompréhensible, car cela cache peut-être quelque chose qui nous est favorable. C’est rationnel, chez moi. »
Romain Gary (Emile Ajar), Gros-Câlin
Libellés : Pensées vagabondes, Photos
1 Comments:
Toi qui aime jouer avec les mots, je te recommande le "visionnage" de cette courte vidéo: http://www.presentationzen.com/presentationzen/2009/03/text-and-narration-on-screen-with-a-twist.html
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