katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

samedi, juin 30, 2007

Nemesis mécanique

J’ai trouvé, dans un endroit où, sacrilège, les livres sont vendus aux kilos, pratiquement tous les ouvrages d’Ivan Illich.

Au niveau du style, je dois bien avouer que ce n’est pas le fils spirituel de Proust, d’ailleurs il n’écrit pas en français, mais certain de ses propos, tenus il y a bientôt un demi-siècle, auraient probablement mérité meilleur sort que celui qui leur a été réservé par bien des personnes prétendument soucieuses de l’évolution de la planète.

Dans le livre d’entretiens dont je vous avais parlé il y a peu, sa toute dernière réplique m’avait particulièrement plu. Après avoir demandé au journaliste s’il avait d’autres questions, ce dernier lui répond que non mais demande à Illich s’il a d’autres réponses.

« J’espère que personne ne prendra ce que je vous ai dit pour des réponses ».

J’ai terminé hier « Energie et équité » dans lequel il mettait en garde, déjà, contre l’acharnement dans la recherche concernant les énergies renouvelables alors que tant de signaux mettent en évidence que le problème n’est pas uniquement dans la nature de cette énergie mais aussi dans la quantité toujours plus invraisemblable que nous en consommons.

Haile Gébresselassie a établi, mercredi, un étourdissant record de l’heure, à savoir 21, 285 kilomètres, sympathique clin d’œil à la réflexion d’Illich sur la nécessité de se rappeler l’importance de ses pieds et de ses mains.

Je ne me suis pas, comme certains journalistes depuis que Sarkozy a remis le running au centre des discussions, demandé si la course à pied est de droite ou de gauche, question qui mérite sans doute la palme de l’interrogation la plus débile de l’année, mais cela me renvoie à un autre impératif énoncé par Illich.

Il serait primordial de considérer qu’il y a un seuil de vitesse optimal, pour l’homme et les sociétés, et que cette limite est nettement inférieure à ce que l’on s’acharne (s’est acharné vu qu’elle est dépassée depuis bien longtemps…) à rendre possible par le biais de moteurs asservissants, cependant cela n’est absolument pas envisageable, politiquement parlant, quelle que soit l’endroit où l’on pose ses fesses de parlementaires.

Ou ses chaussures de joggers.

Illich a écrit cela il y a plus de trente ans alors que les entretiens datent, à part quelques retranscriptions antérieures, de 2002.

Je trouve remarquable qu’une personne qui pouvait constater chaque jour la pertinence de ses prédictions n’en garde pas moins cette volonté d’ouverture au dialogue.

« J’espère que personne ne prendra ce que je vous ai dit pour des réponses ».

Et pourtant.

Libellés :

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

La "croissance", sorte de nouveau veau d'or de la société de consommation pourrait être le paradigme de la réflexion de notre cher Katch.

Cette ultime croissance "nécessaire" pour certains, "destructrice" pour d'autres, n'en reste pas moins le moteur dynamique de la société. Où l'on pourrait rejoindre l'auteur précité, que je connais fort mal, c'est que cette croissance n'a jamais été dirigée dans une optique autre que la dépendance de l'homme envers le système capitaliste. Je m'explique.

La dépendance que nous entretenons avec notre société, nous empêche de percevoir que le fondement même de notre vie ressemble plus à des vaches se rendant à la bétaillère qu'à une amélioration profonde de notre niveau de vie.

Car ce niveau de vie ne peut philosophiquement être rattaché à des choses aussi ridicules que la télévision, les yaourts aux fruits et toutes la somme aberrante de produits souvent inutiles qu'on essaye de nous faire consommer. Ceci résume toute une notion importante de la sociologie (notamment les théories de Maslow) qui concerne l'importance de nos besoins et bien sûr de la satisfaction de ceux-ci.

Les besoins les plus importants pour une bonne partie de la société a dérivé aux fils du temps vers des notions "d'appartenances" et "d'estime de soi". En effet, qui se vêtit aujourd'hui pour se vêtir. Le plus important de nos jours est de faire partie de la famille, d'un groupe culturelle.

Les Marqueteurs l'ont bien comprit et ont récupéré bon nombre de mouvements, tels que le Hip-hop pour en faire le spectacle ridicule que nous connaissons. Le développement des philosophies écologistes et écologiques ont mis la puce à l'oreille aux industrielles qui ont flairé le bon coup économique.

En créant toute une gamme de produits et de concepts tels que le bio, il a été possible de toucher toute une population de consommateurs qui se réclamer "appartenir" à ce groupe de nouveaux hommes désirant vivre dans un monde sain et propre.

En leur vendant des Prius et du biocarburant, le marketing n'a fait que pervertir à nouveau un mouvement pour en faire une nouvelle vache à lait qui rapporte gros. Les produits de type « écologique » représentent aujourd’hui en Suisse environ 5% de la consommation des ménages. Pourtant, l’amélioration sur les gaz à effets de serres ou encore la pollution des sols est risible par rapport aux moyens que nous avons à disposition.

L’économiste Friedmann a dit un jour dans l’une de ses conférences : « il faut particulièrement faire attention aux lumières des casinos de Las Vegas. Nous avons toujours l’impression qu’elles brillent pour nous et par nous. Alors que la véritable nature de ces objets reste que les 100 dollars que vous avez dans la poche, partent faire briller le manoir, du gérant du casino dans laquelle vous allez perdre votre esprit. »

01 juillet, 2007 20:07  

Enregistrer un commentaire

<< Home