katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

jeudi, janvier 28, 2016

mercredi, janvier 20, 2016

jeudi, janvier 14, 2016

dimanche, janvier 03, 2016

s'acoquiner avec l'imprévu et l'inconnu








Depuis le chalet Mélazic, où j'ai travaillé pendant le marché de Noël, en regardant à travers la fenêtre du cabanon, à droite, on voyait le lac qui s'en allait tout doucement vers Genève. Il n'y avait pas besoin de beaucoup d'imagination pour avoir l'impression de se trouver dans une cabine sur un bateau traversant l'Océan.

Une sorte de mise en condition, puisque dans un peu plus de trois mois, depuis Lisbonne, c'est ce que je viserai: une embarcation pour une partie de ce que certains appellent, depuis la fin du XVème siècle, le Nouveau Monde. 


J'y retrouverai Vale d'Amour, qui sera déjà sur place (Buenos Aires?!?) en train de s'acoquiner avec l'espagnol, l'imprévu et l'inconnu. 


Nous aurons ensuite, entre autres points de mire, le Paraguay, où le Georgy, mon grand-père maternel, a tenté de vivre en autarcie de manière intermittente. Il me le contait avec force crocodiles traqués et autres travestis pas toujours distingués. 


Décédé en 1993, personne de la famille n'a jamais mis les pieds à Asunción et environs, ni avant ni après.



Pour en revenir au stand Mélazic, en un mois de lecture absolument pas discrète, pas une seule personne ne m'a demandé ce que je lisais, me laissant chaque fois dépité face à cet hurlant manque de curiosité.

Juste un type qui s'est adressé à moi parce que j'avais l'air content et qu'il voulait savoir si j'étais plongé dans quelque chose de drôle. 


C'était "mourir de penser", de Pascal Quignard, alors non, ce n'était pas à proprement parler à se taper sur les cuisses. 


Il est passé au moment où j'apprenais que Apomnèmoneumata est traduit chez Xénophon par "Mémorables" et chez Êpictète par "Entretiens". 


Dans les deux cas, cela signifie en fait "Souvenirs", précise Quignard.


Ce n'est pas hilarant, mais c'est le genre de chose qui me stimule et m'amuse, je l'avoue.


Gonçalo M. Tavares a dit, répondant au reproche que ses livres sont d'une approche difficile parce que le besoin de penser y est omniprésent, que pour lui, le livre reste effectivement l'outil et le véhicule numéro un d'une intelligence qui se partage et se construit.

Il ajoutait alors que ce n'était pas cette relation au livre, le problème, mais bien le fait que soient appelés "livres" des objets qui devraient être appelés "télévisions".


"Les mots ne sont pas sûrs,

miroirs parmi les miroirs,
plus fragiles, plus incertains, mais

Tu vis de leur stupeur, leur frénésie,

leur chimère. En eux, dans la cage des sons,

Tu t'inscris, et tu prends quelquefois

le chemin qui les traverse
et qui n'en finit pas d'arriver."

Nous venons d'entrer en 2016; c'est en 2006 que j'ai commencé à pianoter par ici. 


Au début, mes déblogages naissaient beaucoup en réaction, à l'actualité ou à certains moments vécus; une écriture de l'indignation avant le déferlement médiatique du mot. 


Petit à petit, tout cela s'est adouci. Ont commencé à apparaître plutôt des instantanés cueillis lors de mes flâneries, rythmés par des refrains et par des citations. 


(Les poèmes ci-dessus et ci-dessous sont de Lionel Ray, dans le recueil intitulé "Comme un château défait")


Le ton a commencé à devenir non pas détaché, mais différemment impliqué, davantage en biais ou en retrait.


"Tu erres dans l'oreille du chant,

tu cherches la mer entre les pages,
ton jour est devenu sable.

Ainsi fleurissent les syllabes

entre l'après et l'avant.

Ici le temps hésite, le bleu est immobile

               comme dans une peinture:
l'éternité est un village."


Et puis j'ai surtout commencé à rédiger des billets de plus en plus rarement, n'y consacrant plus le temps nécessaire, tentant sans succès de trouver un moyen pour y déplier une écriture plus "fluide", passant pour tout dire de moins en moins de moments devant un écran.


Comme se profilent dans trois mois différentes vadrouilles, je me suis dit aussi que j'avais envie d'un autre endroit où accueillir mes divagations scripturales, un lieu qui corresponde à un nouvel élan, à un nouveau souffle, à une nouvelle étape.


Alors oui, ces lignes sont une sorte d'adieu à ce blog. J'y déposerai encore mes chroniques radiophoniques à venir, puis reviendrai y indiquer le lien menant au nouvel espace où (se) débattront mes pensées futures, guère plus.


Je vous salue sur ces vers, glanés dans "Le pyromane adolescent", de James Noël.


"entre les mots et le moi
un mince fil les sépare
un mince fil de salive
reliant le pont de parole
au moteur d'une barque
pour mieux prendre le large"