katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

vendredi, octobre 30, 2015

Katch sur Radio Vostok, 2ème

Après la chronique sur Farquet, très "écrite", j'ai tenté le grand écart lors de la seconde, sur Erri de Luca, me lançant d'avantage sans filet, disant plutôt que lisant ce que je souhaitais condenser en moins de cinq minutes.

Ce n'est pas très réussi, je me trouve plutôt précipité et maladroit, mais ça viendra.

lundi, octobre 26, 2015

1ère de Katch sur Radio Vostok

lundi, octobre 05, 2015

tenter de dire impasses et échappatoires









"C'est ici, à Faro, que s'est imprimé le premier livre au Portugal, en 1487." 

Je l'imagine dire ceci avec un sourire dans lequel passe une magnifique collection de nuages. On sentirait la pluie et le vent si on lui prenait les mains. Il est le dernier bouquiniste de la place, mais il a été mis à la porte de son magasin, le 28 juin dernier, pour loyers impayés. 

Faro, un nom devenu connu loin des frontières du pays. Pas grâce au travail passionné de cet orphelin qui a pris goût à la vie grâce à la lecture, non. Faro est un aéroport prisé par les lowcostistes

En 2013, la ville lui a remis une médaille du mérite, reconnaissant que son local était "une référence dans tous le pays". La distinction, les félicitations et les applaudissements ne l'ont pas aidé à régler ce qu'il devait. 

Peut-être espérait-on qu'il se retire après les honneurs. A 72 ans, franchement. On aurait mis une plaquette commémorative: "Ici, vous trouviez les livres que vous cherchiez depuis longtemps." 

Dans quelques années, comme déchiffrant un nom étrange sur une statue trop imposante, on aurait entendu certains dire: "Ici on trouvait quoi?!?".

Carlos Simões continue de vendre de magnifiques débris de vies, constitués de pages plus ou moins bien conservées, dans la rue. Si vous allez vous baigner non loin, ramenez-moi un bouquin, n'importe lequel, j'en ferai un château, pas vraiment de sable, mais on y entendra quand même la mer et tout ce qu'elle charrie de grandeur et de misères. 

Vítor Silva Tavares, par contre, n'éditera plus aucun de ces petits ouvrages, presque carrés, qui constituaient un ruisseau limpide et rafraîchissant dans la folie d'impressions et de pilonnages rythmant les saisons de la grosse distribution. J'ai failli écrire "dégurgitation".

&etc, ainsi s'appelait sa famille. Des livres dont les tirages oscillaient entre 150 et 500 exemplaire. Tous à tirage unique, même ceux épuisés rapidement. Quelques titres par année, jamais un nombre que vous ne seriez en mesure de compter sur les doigts de vos mains. De l'avant-garde, portugaise ou traduite. Pas que. 

Je me souviens d'un entretien dans lequel un journaliste lui demandait s'il considérait chaque pièce comme ayant une véritable valeur littéraire.

"Non, bien sûr. Et il y a au moins deux livres que j'ai édité parce que je savais que c'était pratiquement une question de vie ou de mort pour les personnes en question. Quel genre d'être humain aurais-je été si je n'avais pas fait ce geste d'amitié alors que j'en avais la possibilité?!?"

Un chroniqueur a écrit ceci, peu après son départ: "Vítor a été, pour beaucoup, le maître que nous avons espéré mériter un jour. C'est ce jour qui meurt avec lui."

Méditant à ce propos en regardant ce que l'automne a commencé à faire des feuilles, m'est revenue cette interrogation qui accueille ceux qui veulent bien la lire, à la gare de Montreux: "De quelle couleur est ton sourire?!?"

Il a 1001 couleurs, me suis-je alors fait la réflexion, pensant au premier volet de la trilogie de Miguel Gomes. Deux heures inégales, un peu "foutraques", même, pour reprendre les mots que j'ai servis à Vale d'Amour, en sortant du cinéma. 

Mais deux heures qui visent à rappeler combien il est nécessaire de raconter des histoires sans détourner le regard. Chercher aussi bien les yeux de notre interlocuteur que ceux de la réalité qui nous violente. Tenter de dire impasses et échappatoires. Se rappeler que l'imagination est une composante essentielle du réel, son manque aussi.