katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

samedi, décembre 27, 2014

sa paresse l'a soutenu avec gloire

Première neige.

Petite marche au petit matin.

Pensées pour Robert Walser, pour Walter Benjamin.

Rapprochés à cause du W?!?

Je ne sais pas trop.

Deux marcheurs, attentifs et curieux, avec des nuages fort différents s'entassant dans leurs têtes; l'un les chassant sans trop de problème, l'autre sans cesse encombré.

L'un en faisant des fables, des chroniques douces et drôles, parfois insolentes; musardant beaucoup, se riant des prétendus impératifs de la "vraie vie".

L'autre compilant, annotant, écrivant des lettres, beaucoup de lettres; toujours dans une inquiétude et une lucidité brûlantes.

Ceci, dans la dernière pour sa cousine Hannah Arendt, en juillet 1940:

"Je serais plongé dans un cafard plus noir encore que celui qui me tient à présent si, tout dépourvu que je sois de livres, je n'avais pas trouvé dans ma mémoire la seule maxime qui s'applique magnifiquement à ma condition actuelle. "Sa paresse l'a soutenu avec gloire, durant plusieurs années, dans l'obscurité d'une vie errante et cachée." (La Rochefoucauld parlant de Retz)."

Quand flemmer revient à aiguiser sans cesse son intelligence du monde, qu'elle soit douloureuse ou souriante, on se dit qu'il faudrait beaucoup plus de politiciens dilettantes, de chefs d'entreprise distraits, de banquiers et d'assureurs détendus. De guerriers indisciplinés et paresseux.

mercredi, décembre 17, 2014

pèlerin






"La grande affaire est ailleurs, dans ce qui oblige à trouver en soi et hors de soi, en guise d'apaisement, un peu de cette lumière qui fait tenir debout nos journées en éclairant leurs pentes, de l'aube au crépuscule, en lui donnant une allure et des ombres. Et chaque jour recommencer.

Ces pierres suffisent, bonheur de trouver une beauté ramassée qui se déploie du dedans vers le dehors, comme une fleur ou une pensée.


Décoller du trafic et se laisser couler comme le sable au fond du verre, lever la tête vers le ciel, aller où l'on ne songeait pas, petits ports, petites îles, petits remblais, petites gens.


Bonheur de me mettre en route sans rien espérer d'autre que ramener un cabochon. Tout est simple, des barques de pêcheurs, un cabanon, le lac ou la mer, il est dimanche et j'entends au loin les cloches d'une église. Derrière la dune, le chant du coq me rappelle à mes engagements. A défaut d'une prière, une pierre.


Je la glisse, incrédule, dans ma poche, je veux d'abord la sentir dans ma paume. La ressors bientôt pour m'assurer que c'est bien elle et qu'elle est encore là, heureux comme un gamin tandis que le jour se débine. Inespéré. Je tiens le viatique pour lequel je me suis levé: oui, ça tient, simplement, non pas que ce soit vrai ou que j'y sois pour quelque chose, ça tient et fait tenir un instant encore ce qui disparaît."



Que dire de ces "tessons" déposés sur le dessin de nos mains par jean prod'hom, si ce n'est que, depuis que j'ai commencé à les caresser, du bout des lèvres et du goût des paupières, je le fais par toutes petites touches, relis, reviens en arrière, de peur d'arriver trop vite, beaucoup trop vite, à la dernière page?!? 

Même si je sais qu'ils ne s'épuiseront pas, qu'ils se feront oublier dans une poche invisible de mon baluchon, referont surface de temps à autre, avec malice et délices. 


Et puis je les offrirai souvent, merveilleux pied-de-nez à la vitesse qu'ils sont, pied-de-nez de quelqu'un qui sent magnifiquement combien il est important d'avoir parfois le nez à hauteur de pieds, pour mieux jauger la beauté quand c'est plus large et plus haut que l'on a envie d'aimer et d'être aimé.