katchdabratch

S'engouffrer dans le sillon de mots indociles; y façonner des points d'appui, pour soi et quelques autres. Pétrir les silences qui sont une partie du terreau où s'ensemence ce qui nous dispose dans le jour. Les inviter à s'ébrouer. Apparaît alors parfois une ouverture, elle offre au souffle un fragment de miracle: ne plus craindre la douceur.

mercredi, décembre 31, 2008

secrète impuissance





"Et même, certaine hantise du Ciel n'est-elle pas née d'une secrète impuissance à voir ce monde-ci, tandis que si nous savions le voir, il deviendrait pour nous le Ciel?"

Gustave Roud, Ange

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vendredi, décembre 26, 2008

Ce qui échappe à la brume






"Je suis comme quelqu'un qui creuse dans la brume



à la recherche de ce qui échappe à la brume



pour avoir entendu un peu plus loin des pas



et des paroles entre des passants échangées..."



Philippe Jaccottet, "Le mot joie"

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mardi, décembre 23, 2008

Beaucoup de ce qui me constitue



C’était le 18 septembre 2006, depuis, 309 messages, un de plus avec celui qui défile devant vos yeux. J’ai commencé ce blog en arrivant à Fribourg. Je me lançais alors dans une aventure rendue possible grâce à cette jubilation des hasards à quoi je tente de rester réceptif, le plus possible. Tellement de belles rencontres depuis que j’ai sauté des rails, depuis que je me suis débarrassé du costume impeccable qu’on voulait me voir porter.



Sortir de l’ascenseur social, lui préférer la cage d’escaliers, s’asseoir alors pour faire du thé, en proposer à ceux qui se sont égarés.



Je ne mesurais pas l’ampleur majestueuse qu’allait prendre l’enchaînement, en musique, toujours en musique, des jours et des nuits auprès de Béatrice.



Danser dans un mélange soyeux de complicité, de compréhension mutuelle, de confiance et de rires.



Une confirmation qu’il est possible, souhaitable, de vivre autrement, de refuser de prendre part à ce jeu de société où les dés sont tronqués, où les règles du marché chantent une complainte qui fait peur.



Mais toujours se remettre en cause, changer de perspective, s’habiller du regard des autres, du plus d’autres possibles.



Je vais me frotter à l’ailleurs, tout d’abord une dizaine de jours à Paris, parce qu’il s’y trouve beaucoup de personnes qui me sont chères, puis prendre un train pour Lisbonne en début d’année.



Ensuite tout est possible. D’abord rester un moment sur place pour essayer d’écrire des lignes qui donneraient à sentir la vitalité de l’hirondelle aux côtés de qui j’ai esquivé les nuages, des pages qui dessineraient le sillage de son vol depuis qu’elle questionne le monde, soufflant sur la poussière fatiguée composée de gris et de résignation.



Je ne sais pas ce que blog va devenir. Est-ce qu’il va survivre à cette nouvelle mue ? Va-t-il changer du tout au tout ?



Tout ce que je sais c’est la joie que vous m’avez procurée en venant vous y promener de temps en temps. En rebondissant lorsque je vous croisais par après, en m’envoyant des courriels, en laissant une empreinte dans les commentaires.



Il y avait beaucoup, beaucoup de ce qui me constitue dans les textes que j’y déposais, cela m’a allégé de pouvoir partager ces questionnements et ces mélodies qui sont miens depuis longtemps, mais que j’ai souvent dû garder pour moi vu le peu d’intérêts qu’ils suscitaient dans mon entourage.



Continuez de lever la tête, de rêver et de refuser. Dans un monde de connerie monétarisée globalisée, il convient de résister, chacun à sa manière, chacun dans son petit maquis, en rayonnant à sa petite échelle.

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dimanche, décembre 21, 2008

DONA LACRIMORUM


"Et que lisent les larmes? Quels livres?


Sont-ce des larmes déçues


qui ne font que feuilleter au hasard?


Sont-ce des larmes qui se reconnaissent


dans un seul vers


et gardent la nostalgie d'un second?


Sont-ce des larmes qui


se parlent à elles-mêmes


et refermeront donc toutes ces pages muettes?"


Vladimir Holan

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lundi, décembre 15, 2008

L'âne de Schubert


"Entendre le braiment primal, suivre les mouvements de son allure maladroite, baisser sa garde, se débarrasser de ce que Janov appelle "le système irréel", c'est un gros risque à courir: de nos jours, être sans défense veut dire être idiot, être un perdant, une créature risible - un âne, un Gribouille. Peut-être pouvons-nous essayer d'y parer par nos éclats de rire tous les deux ensemble, braire à coeur joie, bien fort, être tous bien gentils, comme le prince Mychkine. Je brais en ce moment, à ma façon curieuse, sachant ce qui m'arrive, sachant ce que savait le prince et qu'Anne Sexton a presque su: si nous étreignons un âne, si nous pénétrons au fond de son être, nous pouvons nous dispenser d'être intelligents, oublier tout ce qui nous concerne, oublier ce moi que le monde veut nous voir incarner. Nous pouvons assouvir notre faim, sentir la chaleur d'un âne, tendre la main vers son innocence, regarder nos défenses s'écrouler, redevenir plus purs. Mais fuir sur un âne, c'est davantage que de prendre des vacances et de partir marcher. Fuir sur un âne, c'est braire pour la vie, braire à tout jamais. C'est "tout rapporter à la maison", braire dans la vai quotidienne, là où braire a le plus d'importance."

Andy Merrifield, L'âne de Schubert

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jeudi, décembre 11, 2008

mes ailes s'étirent

« Quand je regarde tomber la neige, je ne peux pas faire autrement que de me dire que chacun de ces flocons a une histoire à lui. »

En regardant par la fenêtre, j’ai un petit sourire et une pensée émue pour Alex à qui je viens d’envoyer un message. Difficile effectivement de ne pas avoir envie de relire cette poésie qu’il nous a fait le plaisir de lire à la Marionnette, samedi dernier.

Hier matin, c’était ma grand-maman qui me disait qu’elle pourrait passer des journées à regarder la neige tomber, apaisée. « Enfin je ne sais pas comment dire, c’est toi le spécialiste des mots. »

Le soir venu, aux abords de la gare, c’est un type un peu éméché qui est venu me dire qu’il aimait ce blanc « immaculé », tellement plus beau que « toute cette merde grise bétonnée ».

Tout à l’heure, Marlène, la maman de Raoul, viendra me trouver, admirer Fribourg qui se trémousse dans le blanc. Elle n’a pas vu la ville depuis plus de trente ans. La cité des Zähringen est toujours magnifique, mais le paysage est bien plus occupé qu’à l’époque. Nous résisterons à notre manière, envoyant quelques boules de neige sur des types trop sérieux.

Ma tournée d’adieux continue. Mes ailes s’étirent de plus en plus précisément.

Du coup, j’espère que ne vous m’en tiendrez pas rigueur, je ne suis pas souvent devant mon ordinateur, ni pour lire, ni pour écrire.

Savoir que vous venez de temps en temps vous laisser envelopper par ces musiques que j’aime suffit à me combler.


"Dernière chance pour toute victime sans nom:



qu'il y ait, non pas au-delà des collines



ou des nuages, non pas au-dessus du ciel



ni derrière les beaux yeux clairs, ni caché



dans les seins nus, mais on ne sait comment



mêlé au monde que nous traversons,



qu'il y ait, imprégnant ses moindres parcelles,



de cela que la voix ne peut nommer, de cela



que rien ne mesure, afin qu'encore



il soit possible d'aimer la lumière



ou seulement de la comprendre,



ou simplement, encore, de la voir



elle, comme la terre la recueille,



et non pas rien que sa trace de cendre."





Philippe Jaccottet, Dis encore cela...

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lundi, décembre 08, 2008

les ombres du lac

Mon évaporation est minutée, les frémissements de plus en plus perceptibles, mes nuits, ici, sont comptées. Bientôt le couvercle sera enlevé. Mes jours n’en seront que mieux contés.


En attendant, valse d’adieux aux abords de la Sarine.


Dernier moment lecture à la Marionnette, le « chef » de la place démontrant avec classe et maîtrise qu’il est possible de « slamer » du Jacques Chessex en s’accompagnant au piano. Il souhaitait faire un petit clin d’œil au vaudois que mes inflexions signalent volontiers quand je n’y prête pas attention. Ou quand je m’enflamme.


Attends seulement que j’te chope par le cotson pour te mettre une schlagée derrière les cornes !


Malgré, ou peut-être précisément par le fait de mon attachement à la poésie, j’espère qu’on entendra toujours dans ma voix, celle de papier et celle de casse-pieds, la traînée campagnarde façonnée entre confections de cabanes et écumées des terrains de foot.


Habiter une écriture « originelle », pour reprendre les mots de Chamson. Impliquée dans un lieu, puisant ses sources dans un paysage.


S’en éloigner, de la place de jeu de mon enfance, pour la sentir vibrer d’autant plus fort dans le refrain que l’absence me tricotera dans le ventre.


Mon exil fribourgeois de ces deux dernières années m’a permis une première mise entre parenthèses, vivant aux côtés de Béatrice une de ces expériences qui marquent une vie.


L’éloignement était tout relatif, mais l’appel du lac, ah mon lac de Neuchâtel !, se faisait souvent sentir.


Hier encore, retrouvant mon petit frère à la gare, je lui ai dit qu’il m’avait hélé depuis le train. Alors nous sommes descendus tranquillement compléter le trio fraternel.


Je devrai bientôt couper le cordon ombilical avec les ombres du lac.

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jeudi, décembre 04, 2008

Cette palpitation dans la paume

Et pour finir la nuit se lasse, s’enlace au jour qui remuait déjà faiblement, chuchotant un nuage, susurrant de timides souhaits bleus.

Il y avait d’abord eu la silencieuse évaporation des étoiles, quelques gouttes venues se balancer à l’extrémité des cils, dociles.

Embrasser ce faible élan signant l’abandon du noir, recueillir ces larmes célestes, les sentir palpiter dans la paume.

S’en servir pour alléger les visages trop chargés qu’on ne manque jamais de croiser.

Juste ouvrir la main, elles savent.

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mardi, décembre 02, 2008

Soyez sympas, rembobinez!

Quelques jours rythmés par un tourbillon de Läckerlis à laisser fondre sur le bout de mes pupilles attentives et curieuses.

Tout d’abord Annemarie, à Nuithonie jeudi, pièce retraçant remarquablement les dernières années de la courte vie d’Annemarie Schwarzenbach, une existence collée sur les soubresauts de la première moitié du XX ème siècle. Une fascinante volonté de changer le court des événements tragiques se tenant de l’autre côté de la frontière, mais des tentatives régentées et argentées, de loin, par une famille fascisante. Une fin prématurée qui verra ses écrits dénaturés par une mère inqualifiable, brûlant tout ce qui pouvait l’être.

Vendredi, énorme moment musical à Frison, Erick Truffaz et Malcolm Braff, accompagnés d’une chanteuse indienne et de son mari, joueur de tabla, ont déroulé une séance d’hypnose collective. Happé j’étais, j’en redemande.

Samedi, expédition surprise organisée par Béatrice. Arrivée au … Breuleux, village des Franches-Montagnes, pour voir un spectacle de Gardi Hutter. Je n’avais jamais entendu parler de ce petit bout de mime phénoménal, mes abdominaux et mes zygomatiques s’en souviendront assurément longtemps.

Dimanche, journée des grands-mamans avec Raphu, partie de Scrabble à Champagne au programme. Remontant le fleuve des âges, il a remporté, lors de la deuxième étape, une victoire de prestige grâce à une lamproie sortie de nulle part.

Puis hier soir, pour couronner le tout, je suis allé voir un film que j’avais raté lors de sa sortie cet été. Un coup de génie de Michel Gondry (cliquer ici pour voir le dernier clip qu’il a réalisé pour Dick Annegarn). « Eternal Sunshine of the Spotless Mind » et « La Science des rêves » faisaient déjà partie de mes incontournables. Eh bien « Be kind rewind » est tout simplement grandiose. Après avoir fait, hilare, du cheval à bascule pendant pratiquement tout le film, la fin m’a imprimé des frissons qui ne sont pas près de s’en aller.

Je le pensais déjà, j’en ai eu la confirmation : sa manière, pas simplement de filmer, mais de donner à voir et à réfléchir, va imprégner mes écrits.

C'est là que je dois toucher du bois?!? Ou dire Inch'Allah?!?