Un chat qui grogne, un shah borgne ou une charogne?!?
Une petite chape de gris, dans la matinée, m’avait donné la possibilité, en dépit de l’estivale chaleur enfin disposée à nous assommer, de rattraper le retard qui était le mien dans mon courrier électronique. Puis, peu avant midi, le soleil tapant à nouveau avec conviction sur nos crânes creux, je décidais d’aller trottiner dans cette vallée du Gottéron que je suis bientôt en (dé)mesure de parcourir les yeux fermés.
Après une entame hésitante, je craignais d’être victime d’un début de tendinite, je me suis vite rendu compte que j’étais en fait dans une forme étincelante, un de ces jours où les foulées se déploient allégrement, aisance semblant narguer les marcheurs laborieux dont je tente d’éviter les langues qui jouent aux escargots.
Cette petite course me permettait d’évacuer les relents d’une discussion brumeuse, le soir précédent, un échange où convictions rimaient à mon goût bien trop avec évictions et élections ; ou quand ce Dieu si improbable trouble encore davantage les contours d’un monde pourtant déjà bien flou.
Comme un clin d’œil, en fin de parcours, je croisais, ruisselant et tout juste vêtu d’un short, une vingtaine de bonnes sœurs mangeant à l’ombre d’arbres majestueux ; ayant en tête un éditorial teinté de voile islamique paru la semaine dernière, j’ai ri de me deviner (at)tentateur.
Un peu plus tôt, c’est à mon pote Petchal que j’avais pensé lorsqu’un lièvre s’était mis à détaller devant moi, effrayé par un de mes pieds qui avait manqué de peu lui ôter ses oreilles. Il ne lui a fallu que quelques secondes pour m’indiquer combien mon impression de vitesse et de légèreté était relative.
A la sortie de Bourguillon, un sourire charmant, venu s’ajouter aux splendeurs dégustées tout au long de mon parcours, me remémorait cet « Hymne à la beauté » appris par cœur avant mes quinze ans, pendant une de ces soirées passées à maudire mes rondeurs d'époque ; mais c’est sur une tout autre note baudelairienne que s’est achevée mon escapade, puisque juste avant de traverser un des deux ponts qui me ramenaient en ville, j’évitais de justesse le cadavre d’un renard.
Je rentrais avec la conviction, encore plus fermement attachée à mon regard, qu’un petit jardinier des mots qui se respecte bêche ces carreaux de blanc en marchant sur un minuscule fil d’eau tendu entre les morts et les vivants.
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